A l’occasion du sommet des Producteurs de Café-cacao sur le revenu décent initié par Fairtrade, le 11 mai dernier, le président de l’ASPCACC, Moussa Sawadogo a, dans son discours de clôture fait une plaidoirie en faveur de l’implication des producteurs dans les décisions qui engagent leur secteur d’activité. Ci-dessous l’intégralité du discours.
Nous, producteurs de Café-cacao, représentés dans des coopératives, Réseau Ivoirien de Commerce Equitable (RICE), Association des Présidents de Conseils d’administration des coopératives de Café-cacao (Aspcacc), nous engageons à produire durablement, à stopper le travail des enfants et à éviter la déforestation. Notre mission est d’améliorer les moyens de subsistance de nos familles et de contribuer à la prospérité des communautés. Cela est absolument nécessaire, car de nombreuses études montrent qu’une grande majorité de producteurs de cacao ne peuvent toujours pas se permettre un niveau de vie décent. Nos revenus sont insuffisants pour bien nourrir nos familles, vivre dans un logement décent, envoyer nos enfants à l’école ou accéder à des soins de santé adéquats. Sans parler d’avoir des économies à réinvestir dans nos fermes pour améliorer la productivité ou diversifier les cultures.
Nous considérons qu’il est de notre responsabilité de mettre en œuvre de bonnes pratiques agricoles et d’améliorer la productivité, la qualité et la résilience de nos exploitations, produisant du cacao et d’autres cultures. Cependant, cela n’est possible que si nous avons accès à des intrants et à une assistance technique adéquats, à un financement abordable et à des marchés stables et fiables. Nous appelons l’industrie et les décideurs politiques à façonner un environnement propice qui nous permet d’’être des fournisseurs efficaces de cacao durable de haute qualité, tout en gagnant un revenu vital pour nos familles.
Un appel à l’industrie
- Pour investir dans nos exploitations et produire durablement ; afin d’être des coopératives efficaces et professionnelles qui répondent efficacement aux besoins de nos membres, nous avons besoin de partenariats commerciaux stables avec des accords d’approvisionnement à long terme. Les pratiques d’achat favorisant le revenu vital doivent être intégrées dans toute conduite commerciale responsable : nous devons être en mesure de vendre nos produits à un prix qui couvre les coûts d’une production durable et nous permet d’avoir un niveau de vue décent.
- Des engagements d’approvisionnement à long terme à des prix durables sont nécessaires pour planifier notre activité. Ainsi, les coopératives peuvent jouer un rôle clé dans la gestion de l’offre.
- Nous avons besoin que l’industrie partage les risques d’investir dans la productivité et la diversification agricoles face au changement climatique.
Un appel aux initiatives sectorielles multi-acteurs
Nous saluons les initiatives nationales pour un cacao durable en Allemagne, en Belgique, en Suisse, aux Pays-Bas et en France. Et l’inclusion d’objectifs de revenu vital dans ces engagements sectoriels. Cependant, il serait important d’inclure plus fortement la voix des producteurs dans ces discussions afin de s’assurer que nos besoins sont bien pris en compte et pris en compte dans l’action à venir. A cette fin, nous avons quelques suggestions :
- Créer davantage des espaces de concertation entre les différents signataires d’un côté et les producteurs de l’autre côté pour s’assurer qu’il y ait une communication optimale.
- S’assurer que les préoccupations des producteurs soient pleinement prises en compte et qu’il y ait une véritable co-création de projets et de programmes.
- Nous demandons de créer un environnement favorable au sein des MSI avec les autorités pour stimuler les pratiques d’approvisionnement responsables avec des prix durables pour les producteurs. C’est dans cette même optique que nous suggérons aux ISCO de faire une différenciation entre les primes qui permettent de réellement faire la différence pour une revenu et celles qui n’y arrivent pas.
Un appel aux décideurs politiques des pays consommateurs
- Nous considérons la législature comme la voie la plus importance pour réaliser une amélioration des revenus à grande échelle. Des mesures politiques cohérentes doivent être élaborées dans les pays producteurs et consommateurs de cacao pour consacrer et promouvoir le revenu vital en tant que droit humain, afin d’assurer un impact durable et profond. Il est donc essentiel que les décideurs incluent le revenu vital et les pratiques d’achat responsables comme partie intégrante des politiques sur la conduite responsable des entreprises pour parvenir à la durabilité dans le secteur du cacao.
- Nous recommandons d’inclure des pratiques d’achat responsables et permettant un revenu vital dans les lois et politiques relatives aux droits de l’homme et à la diligence raisonnable environnementale (HREDD) et, en particulier, nous espérons voir le revenu vital référencé dans la directive européenne sur la durabilité des entreprises et la diligence raisonnable. Ici, il est essentiel de s’assurer que la législation n’aura pas de conséquences négatives inattendues pour les agriculteurs les plus vulnérables en raison des stratégies de mise en conformité des entreprises.
- A cet égard, nous saluons la Déclaration sur le revenu décent et le salaire décent, signée par l’Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique et encourageons d’autres pays à y adhérer.
- Veiller à ce que les exemptions aux politiques de concurrence, telles que les accords de durabilité, soient rendues possibles, pour permettre aux petits exploitants agricoles d’atteindre un revenu décent. Adopter des lois interdisant l’achat de produits en dessous des coûts de production durable dans le cadre des pratiques commerciales déloyales. L’inclusion de revenu décent dans le calcul de ce qui constitue le coût de la production durable est essentielle.
Je vous remercie